vendredi 26 avril 2024
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Développons les Comités Populaires (CPES), garants de la victoire!

Bilan d’une lutte dans un quartier prolétaire : les habitants face à un bailleur carnivore.

Le 1er novembre 2022, les habitants du quartier des Etats-Unis et plus généralement l’ensemble des locataires de Grand Lyon Habitat, un des bailleurs sociaux (HLM) de Lyon, ont eu la désagréable surprise de recevoir un courrier de régularisation des charges, dont la somme variait de 150 à 500 euros selon les cas et tout cela sans aucune explication. Avant cela, les locataires recevaient une régularisation à leur avantage, même si ce processus permettait de manière honteuse au bailleur de se faire une trésorerie temporaire sur le dos des locataires.

Les habitants sont entrés en lutte spontanément, puis ont été rejoints et organisés par le Comité Populaire d’Entraide et de Solidarité (CPES) du quartier. Rapidement, des liens sont pris avec le Comité de Locataires de Mermoz (un autre quartier prolétaire du 8e arrondissement). La mobilisation combative organisée par les habitants au travers des CPES a permis une double victoire : d’abord, un échelonnement des charges, qui a été obtenu grâce à la lutte acharnée des habitants et habitantes. Avec l’inflation et la hausse du SMIC, c’est l’équivalent d’une perte sèche pour Grand Lyon Habitat. En effet, l’argent versé à la fin de l’année vaudra moins qu’au début. Il y a donc bien une victoire de la mobilisation, acquise par et seulement par la mobilisation combative. De plus, cet échelonnement permet aux foyers de connaitre une situation plus viable que s’ils avaient dû payer l’ensemble des sommes demandées en une seule fois.

La seconde victoire, elle, est politique : des habitants se sont rassemblés, organisés, politisés dans une lutte prolongée. Nouvelle Époque tient à revenir sur le déroulé chronologique de cette lutte riche en enseignement.

Comme nous l’avons dit, le 1er novembre les locataires du bailleur « social » Grand Lyon Habitat (GLH) reçoivent des courriers réclamant la régularisation des charges. Quelques habitants décident d’appeler à un rassemblement devant l’annexe du local du quartier des Etats-Unis. Le CPES du quartier se saisit immédiatement de la question. Les activistes décident immédiatement de distribuer dans les boîtes aux lettres et aux habitants du quartier des tracts appelant à ce rassemblement. Le 2 novembre, soixante-dix habitants sont réunis dans le froid ce mercredi matin, subissant les bégaiements et les explications opportunistes des bureaucrates de GLH. Un deuxième rassemblement va se dérouler le 9 novembre, suivi d’une assemblée publique afin de s’organiser collectivement. Les habitants mobilisés dans les CPES décident de ne pas en rester là. Ils se rendent à la fin du mois de novembre au conseil d’administration de GLH, qui se déroule dans la mairie du 8e, pour forcer le maire à se positionner sur ce sujet.

Plus de 50 habitants se rendent devant la mairie où, face à la colère des habitants, le maire n’a d’autre choix que de les faire rentrer dans une salle. Lors de cette réunion, le maire reconnaîtra qu’il ne peut, ni ne souhaite soutenir les habitants face au bailleur, avant de partir en cours de réunion. La fraction des habitants qui avaient voté « à gauche » se rend bien compte, lors de cet événement, que la mairie « de gauche » n’a rien à faire de la vie quotidienne et des difficultés des quartiers prolétaires, et que tous les politiciens de « gauche », comme de « droite » sont en réalité les mêmes. C’est une victoire contre l’opportunisme de ceux qui se servent des difficultés des masses pour leurs propres calculs boutiquiers.

Les habitants en colère comprennent bien une chose : ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Ils comprennent également que sans le CPES, sans organisation collective, rien n’est possible : la colère initiale serait retombée comme un soufflet. Les associations de locataires sont délégitimées aux yeux des manifestants, n’étant présentes que lors du premier rassemblement pour tenter de faire adhérer des habitants à leurs associations, et en dénigrant le travail du CPES, mais surtout en rejetant toutes les propositions de front commun pour lutter collectivement contre ces charges abusives. Elles ne servent qu’à être un thermomètre de la colère, et permettent de faire quelques petits ajustements lorsque la cocotte-minute menace d’exploser. À la suite de cela, de nombreuses autres rencontres ont eu lieu dans le cadre du CPES, notamment lors de la deuxième édition du Noel Rouge (une collecte et distribution de cadeaux aux habitants), où une assemblée a décidé de la suite des événements. Il fut notamment décidé de la mise en place d’une lettre de revendication commune, puis d’une pétition, ce qui fut chose faite. (Voir ici : https://www.nouvelleepoque.fr/le-cpes-des-etats-unis-lance-une-petition-contre-les-frais-injustes-de-grand-lyon-habitat)

Nous devons souligner que la plupart des habitants et habitantes rassemblés connaissaient le CPES, dont beaucoup se revendiquaient. L’immense majorité des gens rassemblés contre GLH venaient du quartier Etats-Unis-Viviani, là où est le plus implanté le CPES. Pourquoi ? Parce que les habitants s’approprient de plus en plus les CPES. Le travail de masse commencé depuis presque deux ans a permis la fusion entre cet instrument, les militants qui l’animaient et les habitants du quartier : lutte des caves, campagne pour une aire de jeu, Noel Rouge, sport populaire… Les habitants veulent s’organiser au sein d’organisations combattives, qui ne font pas cela pour l’argent ou pour obtenir une place au chaud dans les conseils d’administration ou dans les mairies.

Il ne faut pas s’imaginer que le CPES « recrute » des habitants et construit une organisation. Les habitants se rassemblent, dans la lutte, autour du CPES, suivant d’abord l’initiative des activistes, avant de s’emparer pleinement des problèmes quotidiens. Le CPES est un formidable outil, qui permet de mener les habitants à la victoire. La Ligue de la Jeunesse Révolutionnaire (LJR) travaille avec et dans le CPES, permettant la mise en place de réunions publiques, puis dans le futur d’Assemblées Populaires, qui seront décisionnaires et la matérialisation de la démocratie.

Nous avons appris et prouvé que l’organisation est nécessaire à l’action collective victorieuse, les masses l’exigent, et le CPES est le début de la réponse. Comment organiser et développer la lutte sans cela ? Une autre nécessité est la mise en place d’Assemblées Populaires, ou de réunions publiques, pour que s’expriment les habitants et faire ainsi vivre la démocratie à la base, d’essence prolétaire. Ces décisions doivent être appliquées par l’organe dirigeant de l’assemblée.

Si nous revenons sur notre chronologie, nous voyons cela parfaitement avec le rassemblement devant la mairie du 8e. Les habitants les plus déterminés sont venus du quartier des Etats-Unis, en particulier du quartier Viviani, mais aussi de Mermoz et d’autres lieux du 8e. Ils se sont parfaitement reconnus dans le CPES, qui a défendu leurs intérêts et restitué les idées exprimées collectivement de manière juste et combative. On a vu les habitants tenir les banderoles du CPES, le poing levé, féliciter les activistes de leurs interventions, et commencer à se demander comment participer réellement à la direction du CPES. Une autre victoire, c’est le réseau qui se crée autour du CPES, avec par exemple des ateliers banderole (à accrocher aux balcons), des petites réunions chez des habitants, etc. Le CPES tend à devenir l’organe de référence de lutte comme de vie dans le quartier. Les activistes et habitants ont démontré que la construction du CPES se fait sur le long terme, que le CPES ne lâche rien, défend les intérêts des habitants, et que ce sont les habitants eux-mêmes qui le font vivre.

Si aujourd’hui la lutte contre ces charges n’a plus la même intensité qu’il y a 3 mois, le CPES a tout de même permis d’obtenir des victoires concrètes, et de forger un noyau d’habitants, qui à n’en pas douter, lors de la prochaine injustice, sauront se lever avec le CPES, pour obtenir encore plus de victoires ! Les habitants savent qu’ils peuvent véritablement participer à la vie du quartier, et commencent à entrevoir ce qu’est une véritable démocratie.

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